LA DESCENTE DE JUNIPER RIVER

LA DESCENTE DE JUNIPER RIVER (04-02-16)

(du  03/02 au 04/02)

Il suffit parfois d’une rencontre pour se diriger vers l’inconnu. La liberté du voyage au long cours nous permet de vérifier cette idée puisque nous n’avons pas d’itinéraire précis. Sur la cote ouest à Smyrna Beach, nous avions fait connaissance de David, un américain cinquantenaire fort sympa. Nous étions alors sur un spot pour observer des lamantins (que nous n’avions pas vu d’ailleurs…..), et j’en avais profité pour m’informer sur les endroits que nous pouvions visiter en Floride. L’expérience des uns et des autres nous enrichit et j ai plutôt l’habitude de me fier aux personnes que je rencontre. Il est vrai que nous sommes tous différents, certains sont sensibles à la nature, d’autres à l’ambiance. Il est vrai aussi que notre sensibilité et nos centres d’intérêts divergent. Même le climat peut rendre un séjour agréable comme il peut le rendre ennuyeux. Mais mon instinct me conduit à écouter les conseils de David : faire la descente en canoë de Juniper River, un lieux situé en pleine nature dans la foret tropicale. En remontant la cote ouest de la Floride, nous quittons ainsi l’interstate 75 pour bifurquer vers « Ocala National Forest ». Parmi les scènes intrigantes de la vie quotidienne, nous remarquons que certains habitants font carrément brocante à domicile : nous sommes dimanche et ils sortent leurs affaires devant leur porte. De meme, des hommes font les zigotos au bord de la route, agissant des panneaux publicitaires pour attirer l'attention des automobilistes.... Sur une trentaine de miles, nous voyons défiler une multitude d’églises de différents courants. Catholiques, orthodoxes, évangélistes, méthodistes, luthériens, baptistes, épiscopaliens, ils sont tous croyants par ici mais ils ont l’air d’avoir du mal à ce mettre d’accord !

Ce matin, je fais rapidement classe à Elsa pour pouvoir profiter de la journée, par chance le soleil brille. Il est précisément 11h36 quand nous entrons dans le petit local dédié à la location des canoës et des kayaks, après avoir passé une trentaine de minutes à préparer le pique nique de la journée….. Mais nous ressortons 15 minutes plus tard le moral au plus bas car il est impossible de faire la descente aujourd‘hui. La dame de l’accueil est intraitable : pas de location après 11h30 et je peux même vous dire que si nous étions arrivés à 11h31 cela n’aurait rien changé! Une fois de plus nous constatons la rigueur américaine, les règles sont les règles, la loi est la loi…….. Oui nous sommes déçus, mais tant pis chez les Leger on n’abandonne pas, ce sera pour demain! Finalement, une baignade dans l’eau froide de Juniper Spring ainsi qu’un petit trail dans la foret, bien que trop long au gout des enfants, remplieront à souhait notre journée.

Le lendemain matin, nous nous réveillons fort motivés, après avoir passé une nuit à ramer dans notre lit. J’avais bien envie d’arriver à 11h29 mais bon ça ne sert à rien de provoquer. Le pire arrive au moment de confirmer la location du canoë, la dame nous explique qu’il est impossible de faire la descente si Robin ne pèse pas plus de 40 pounds…. Mon visage se décompose car je ne suis vraiment pas certain qu’il les fasse. Malgré ses 6 ans demain, il faut dire que c’est un vrai Leger notre Robin! J’ai envie de lui dire : tu vois tu aurais pu le finir ton petit dej ce matin….. Pour Elsa, armée de ses 8 ans pas de problème, mais quand le fiston monte sur la balance, l’aiguille s’arrête près du 40. Un petit réglage de l’instrument de mesure s’avère nécessaire, finalement le verdict sera de 41 pounds. On l’a échappé belle ! Un peu plus et l’on revenait le lendemain matin après avoir gavé Robin. La rigueur est omniprésente : avant d’embarquer, nous sommes obligés faire contrôler notre bagage, un peu comme à l’aéroport….. Nous serons finalement contraints d’abandonner sur place notre bouteille d’eau, le papier alu qui entoure les sandwichs et l’emballage qui protège les chips. Pour ceux qui souhaitent un jour réaliser cette superbe descente, sachez que pour préserver la nature, tout contenant est interdit à l’exception des emballages durs tels que les gourdes et les tupperwares.

David ne m’avait pas dit que la descente de rivière Juniper était plutôt destinée à des sportifs confirmés. Nous en avons pour près de 4 heures et il va falloir assurer…. La première image qui me vient à l’esprit en repensant à cette promenade très technique est un petit sillon d’eau qui serpente à travers les arbres penchés de Juniper. Les premiers coups de pelles sont difficiles, le fond des eaux est bas et l’embarcation est régulièrement  freinée par le sable. Je comprends rapidement qu’il est nécessaire de rechercher les endroits les plus profonds pour pouvoir être efficace. J’avais eu la bonne idée de demander une rame de kayak en plus des 2 pagaies fournies avec le canoë. C’est beaucoup plus pratique quand on navigue seul. Nous naviguons dans un univers fantastique, ici et la, les arbres jouent avec la nature et se penchent sur notre passage tandis que les rayons de soleil nous apportent une lumière féerique. L environnement est exceptionnel, le silence de la nature,  parfois perturbé par quelques bruits de froissements, se mêle au clapotis de l’eau et aux chants des oiseaux. J’adore…..

Le cours d’eau s’élargit au fur à mesure de notre avancée et je dirige l’embarcation à travers une multitude de palmiers. Soudain Robin se lève, et vient rompre le silence des lieues s’exclamant à vive voie : « la, la une tortue ! ». Il s’agit la de notre première rencontre avec les habitants de la foret de Juniper. Nous passons plusieurs minutes à nous extasier devant cette tortue intrépide, jonchée sur un tronc d’arbre.

La végétation est dense, exubérante et il est parfois difficile d’avancer. En effet nous sommes souvent freinés par un ou plusieurs arbres couchés au travers de la rivière. Mon expérience de rameur (d’aviron) ne m’est pas inutile et je me sens petit à petit plutôt à l’aise, bien que je n’aie jamais réellement pratiqué cette discipline auparavant.

Une halte repas s’impose, ils ont toujours faim ces enfants….. Mais les chips, émiettées et humidifiées, n’auront que très peu de succès! Les tortues défilent et les enfants ne cessent de s’extasier devant ses petites bêtes peu farouches. Il arrive même qu’elles nous gratifient d’un superbe plongeon dans l’eau depuis leur perchoir. Alors que je me lamente de ne pas avoir aperçu d’alligators, nous approchons sans le savoir d’un beau spécimen. Celui-ci, en pleine séance de bronzage, sommeille sur la berge et ne fait guère attention à nous.

Les alligators sont plutôt inoffensifs, ce ne sont pas les énormes reptiles d’Afrique capables de croquer un humain. Nous sommes des proies trop grosses pour eux et ils nous craignent davantage que ce que nous ne les craignons. L’important est qu’ils aient toujours la possibilité de s’échapper afin qu’ils ne se sentent pas emprisonnés et donc effrayés. J’ai beau le répéter à Elsa mais celle-ci est un peu timorée et nous restons évidemment à une distance raisonnable.

Peu de temps après, nous passons à coté d'un banc de 3 tortues, qui tranquilement jonchent au dessus d'une branche au dessus de l'eau. Une belle photo s'impose... Un peu plus loin, nous croisons deux cardinaux rouges, trop beaux ces petits oiseaux mais pas évident de les prendre en photos!

La fin de la descente approche et la rivière de Juniper me réserve une jolie surprise. En plein virage, alors que je viens de franchir difficilement 2 tronçons en guise de barrière, surgit soudainement une jolie sirène en pleine baignade dans les eaux tropicales. J’ai tout juste le temps de tourner la tete quand je m’aperçois que celle-ci dissimule furtivement sa nudité. On a bien fait de la faire cette descente…….

Oui, sans rire, on a vraiment bien fait de la faire cette descente, avis aux amateurs d’aventure et de nature……..