RENCONTRE DES "FIVES APPLES" A LA NOUVELLE ORLEANS

RENCONTRE DES  FIVES APPLES  A LA NOUVELLE ORLEANS

RENCONTRE DES "FIVES APPLES" A LA NOUVELLE ORLEANS (19-02-16)

(du 05/02 AU 17/02)

 

Depuis un certain temps, Robin ne cessait de me demander quand nous arriverions à la Nouvelle Orléans. Pourquoi était-il si impatient ? En fait, je lui avais promis que nous fêterions son anniversaire dans la plus célèbre ville de Louisiane…

Après une longue distance parcourue en camping car (plus de 570 miles), je respecte donc ma promesse. A sa plus grande joie, Robin souffle ses 6 bougies dans le camping car. Non, c’est pas vrai, il n’y en avait qu’une seule de 6 ! Papa tentera de le gâter avec un jeu de société et des Lego, mais il n’y a pas tous les copains, et surtout maman est si loin. Loin, mais c’est elle qui lui fera le plus beau cadeau en lui annonçant qu’elle viendra nous rejoindre prochainement ! C’est la joie dans le camping car, les enfants explosent de joie, crient et sautent en l’air…… Le gâteau n’est pas formidable, mais on s’en fout, nous sommes tous tellement heureux. Les américains ne sont vraiment pas doués pour la pâtisserie et on aura du mal à finir ce truc rond, pâteux et bourré de crème.

La Nouvelle Orléans (NOLA pour les intimes) est située sur les bords du Mississipi, sur les rives sud du lac Pontchartrain. Fondée en 1718 par les colons français, la ville fut ensuite cédée à l’empire espagnol puis reprise par la France pour être définitivement vendue aux Etats Unis par notre cher Bonaparte en 1803. Sa grande particularité est qu’elle se trouve en dessous du niveau de la mer, en moyenne 60cm! Elle est donc protégée par des kilomètres de digues ainsi qu’un réseau de pompes qui draine la ville et qui est utilisé lors des inondations. Tout cela n’a malheureusement pas suffit pour faire face à l’ouragan Katrina et la ville a perdu 30 % de sa population en 2005.

Par chance, nous arrivons en plein carnaval. Et si l’on connait plus le carnaval de Venise ou de Rio, sachez que celui de la Nouvelle Orléans est aussi une véritable institution……..Depuis plusieurs semaines, les universités de Louisiane, de Mississipi et même d’Alabama défilent chaque jour avec de nouveaux chars. Alors que nous nous rendons en centre ville afin d’assister à une parade, je me retrouve dans un sens unique bloqué par un cortège. Il y en a pour 4 ou 5h parait-il. Par chance un parking à plusieurs étages est situé au bout de la rue, je m’y enfile avec hésitation : le camping car cogne les barrières en hauteur. Je n’ai pas vraiment d’autres solutions et je me lance, la peur au ventre. Les gardiens du parking me font signe d’avancer, d’après eux ça passe…. Je roule doucement, j’ai vraiment peur de toucher les poutrelles en béton du plafond. En plus, je ne vois pas trop  comment je pourrais sortir à reculons du  parking. Des véhicules attendent derrière moi dans le virage, je sens la galère arriver….. Et elle arrive bien : à hauteur du péage, alors que je suivais les gestes du gardien, quelque chose touche le plafond, soudain je me retrouve soudain bloqué ! Ni une ni deux, je sors, mon cœur se met à trépider….. « Quel con ! » me dis-je, en pensant à moi. Ouf ça va, c’est juste le filetage de l’installation de la roue de secours, positionnée sur le toit, qui a touché la poutrelle. Je recule donc afin de d’améliorer la situation. Heureusement une seconde barrière est disponible pour les autres véhicules et je ne bloque personne…. C’est bon, je monte sur le toit, j ai trouvé une solution…… Pendant une trentaine de minutes, je démonte le système (difficilement car je n’arrive pas à sortir les boulons du filetage comme celui-ci est tordu). J’enlève ensuite la roue de secours qui prend place provisoirement à l’intérieur du camping car…. C’est le bordel, mais on a bien gagné une quinzaine de centimètres en hauteur. Ouf, je peux enfin me garer, on a loupé le début du cortège mais on est à deux pas du défilé !

Tandis que Robin et Elsa sont follement excités à chaque passage de char, je reste dubitatif et inquiet à l’idée de sortir du parking car le plafond du parking me semblait plus bas dans le sens du retour que dans celui de l’aller…. Cela ne nous empêche pas de profiter de la soirée et de récolter des centaines de colliers et de gadgets jetés par les acteurs de la parade. Du coup, nous en avons tellement que nous sommes obligés de retourner au parking pour vider les sacs….

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A tour de rôle, je prends les enfants sur mes épaules afin qu’ils soient à hauteur des chars et cela marche. Peu importe que cela soit des conneries, la sensation d’attraper toutes ces babioles nous grise et l’on est fin heureux. Oui même moi, je me suis pris au jeu !

Quelques minutes après le défilé, nous avons le droit à une nouvelle parade : celle des nettoyeurs de rue. Il est bien vrai que les rues sont devenues des dépotoirs. Ce sont les bulldozers qui passent dans un premier temps, avec leurs bennes, ils ramassent le plus gros des déchets. Ils sont ensuite suivis de plusieurs dizaines de balayeurs qui à la queue leu leu débarrassent le sol du moindre du petit papier. Enfin les engins de nettoyage interviennent pour « cirer » la rue. Tout cela se fait en quelques minutes et est répéter chaque jour…. Quelle organisation ! Il est temps de quitter le centre ville, finalement, plus de peur que de mal, nous ressortirons lentement mais surement de ce satané parking.

Nous trouvons bien souvent refuge sur les parkings de Walmart, une chaine de centres commerciaux. La plupart du temps, nous sommes acceptés sans problème et nous jouissons en plus de l’internet. Je me rends compte que les temps ont bien changé, moi qui voyageais sans ordinateur et sans internet vingt ans auparavant quand je baroudais avec mon sac à dos !  Un soir, peu après que Robin ait fait des siennes et que papa se soit mis gravement en colère, un homme avec de petites lunettes rondes et coiffé d’un bonnet jaune frappe à la porte. Je réponds à son appel et descends du véhicule bien que je sois certain qu’il s’agisse d’un mendiant, comme cela arrive parfois sur les  parkings. Et bien non, il s’agit d’Arnaud, un Français qui voyage avec sa femme thaïlandaise et ses trois garçons. Ils ont garé leur bus aménagé en camping car, à quelques mètres de nous…… On prend rendez vous pour le lendemain. On ne le sait pas encore, mais nous allons passer plus de deux semaines ensemble ….

Les « Five Apples » sont les premiers voyageurs  que nous rencontrons et cela fait un bien énorme. Tout de suite le courant passe entre nous. Arnaud et Sue ont vécu plusieurs années à Siem Reap au Cambodge. Ils avaient une petite affaire de boulangerie, pâtisserie et restauration qu’ils ont finalement revendue afin de voyager autour du monde.

Nous retournons ensemble en centre ville pour le dernier jour du carnaval, il nous faut finir notre récolte. Pour l'occasion, nous nous coiffons de nos perruques colorées, histoire de se mettre dans l'ambiance.

Les « Five Apples » ont déjà une centaine de kilos de bijoux et nous peut être une cinquantaine…… Dans l’ambiance indescriptible du carnaval, malgré tous nos efforts et notre énergie, nous ne parviendrons pas à les rattraper, victoire incontestable de nos amis voyageurs ! Mais Elsa réussira miraculeusement à attraper une coconut, la noix de coco symbole du carnaval, on a sauvé l’honneur.

Alors que nous sommes en pleine effervescence, je m’aperçois soudainement que mon porte monnaie a disparu. Je l’avais maladroitement mis dans ma poche arrière et j ai du me le faire chiper. Grace à Skype, je joins tout de suite Miha pour qu’elle fasse opposition aux cartes bleues. Plus de peur que de mal, je m’en sors bien.

Le soir même, nous sortons Arnaud et moi, faire une petite virée dans le « French quarter », que l’on appelle aussi le Vieux Carré. Nous pénétrons dans Bourbon Street, une rue qui a deux visages. Le jour, c’est le charme de ses vieux bâtiments, de ses balcons en fer forgé, et de ses musiciens afro-américains. La nuit c’est la décadence, l’endroit ou tout est permis ou presque….. D’ailleurs j’y suis allé avec les enfants le premier soir, autant vous dire que j’ai du rapidement bifurquer! Mais la, c’est la dernière nuit du carnaval, le moment le plus chaud de l’année, la fête va continuer jusqu’au petit matin et nous avons décidé d’y participer à notre façon….. La rue est littéralement bondée de monde, les gens essaient de se frayer un chemin, un « go up », (gobelet en plastique) à la main. La Nouvelle Orléans est en effet l’une des rares villes ou il est autorisé de consommer de l’alcool dans la rue. On croise toute sorte de personnages extravagants, aussi bien des passants déguisés en docteurs spécialisés dans la mammographie, des hommes déguisés en croco, des chevaliers d’une rare élégance, une chaude brésilienne au couleur du carnaval. On croisera même  Jésus Christ portant sa croix ! Petit coup de pub de l’Eglise…. il faut toujours être la quand il y a du monde.

Au dessus de nous, les balcons en fer forgé sont bourrés d’hommes et de femmes qui, colliers et gadgets fluos à la main se font désirer….. Certains lancent facilement tout leur attirail mais d’autres jouent le jeu de la séduction. Certaines demoiselles, haut perchées, n’hésitent pas à montrer leur petite culotte, afin que les prétendants fassent de même, voir plus….. Nous aussi, on jouera le jeu, n’est ce pas Arnaud ?....

Malgré l’alcool, tout se passe dans une atmosphère ultra conviviale. Et si l on est parfois plusieurs à attraper un gadget ou un collier, il y a toujours un sourire au bout des lèvres ou un petit mot sympa. La police, à cheval, assure la sécurité, d’ailleurs, j’en observerai un entrain de siroter une bière…… Bon cela n’empêchera pas que je surprenne quelqu’un les mains dans mes poches à deux doigts de me piquer mon appareil photo……

Plus tard, nous découvrons le Vieux Carré, si différent, en pleine journée. Ses ruelles bordées de nombreuses maisons typiques au style colonial français avec ses toitures en pentes couvertes de tuiles nous enchantent. Les balcons fabriqués en fer forgé, ornés de jolies plantes et habillés aux couleurs du carnaval attirent sans cesse notre regard. Les maisons sont décorées aux couleurs officielles: violet, vert et or, respectivement couleur de la justice, de la foi, et du pouvoir. Les rues et les enseignes ont parfois conservé des noms français.

Le quartier a un petit brin de folie à chaque coin de rue. Ce peut être un homme qui fait la statue, un qui joue au cow boy, un élégant qui pose en train de traverser ou même un prestigitateur qui joue avec le feu. Sur notre parcours, nous croiserons également un type déguisé en Mignons, une femme déguisée en monstre et surtout le top du top : un chien rose ! On croisera aussi quelques bonhommes qui nous rappelle que la nuit a été longue et agitée....

Peuplée à plus de 65 % d'Afro-Américains, la Nouvelle-Orléans est devenu un lieu de bouillonnement artistique et musical. Nos oreilles se font plaisir à écouter chaque attroupement musical. Chacun a son propre style, du jazz au blues, à la musique afro-américaine des esclaves…. On se régale. Ce n’est pas pour rien que NOLA, capitale du jazz, est le lieu de naissance d’un certain Louis Armstrong, nous en profiterons d’ailleurs pour faire un petit tour au parc qui porte son nom.

Un dimanche, nous sortons tous ensemble à l’église de Sainte Augustine afin d’assister à une messe gospel dans le quartier de la Trémé, (ah maman si tu me vois de tout en haut, ce que tu as du être contente !). Ai-je déjà apprécié autant une messe ? Rien à voir avec l’ennui auquel j’étais confronté lorsque, petit, je m’endormais sur les bancs (un peu plus grand je m’ennuyais quand même, mais je ne m’endormais pas…..). Bon, il y en a quand même un qui trouvera ça ennuyant et nul, d’après ses propres mots, je tairais le nom, n’est ce pas mon fils ?..... Quelques blancs assistent à l’évènement mais la majorité des gens sont des noirs afro américains. Nous profitons pendant près d’une heure, de l’ambiance décontractée, des chants entrainants et de la joie enivrante autour de nous….. On fêtera même l’anniversaire d’un petit garçon en chantant un « happy birthday » en gospel! Et bien que l’on ait pas tout compris, un bien être nous envahit en sortant de l’église. Un moment magique que nous ne sommes pas près d’oublier……

Quand je goute à la cuisine de Sue, je comprends pourquoi leur petite entreprise marchait si bien : c’est un vrai régal. La femme d’Arnaud est une formidable cuisinière, on la voit plus souvent derrière les fourneaux qu’autre part….. Arnaud lui a fait une véritable cuisine sur mesure comme elle voulait, c’était une condition essentielle pour qu’elle accepte l’idée du voyage….. Je profiterai de ses talents et de sa gentillesse pour apprendre à cuisiner de bons petits plats dont ma soupe préférée : la Tom Yam Kung.

Les enfants s’entendent à merveille. Lalo, 13 ans, Luno, 10 ans et Milo 8 ans apprennent à Robin et Elsa comment faire du skate et du roller sur le parking de Wal-Mart. Entre la peinture, les coloriages, la création de pistolets en papier,  les films et dessins animés sur l’ordi, la recherche de trésors et même la cuisine, les enfants s’occupent facilement ensemble.

Nous mangeons désormais tous les jours ensemble, comme une véritable petite famille, tantôt dans le bus tantôt dans le camping car, qui est un peu plus spacieux et parfois au resto. Bien souvent, c’est Sue nous prépare à manger, j’essaie de ne pas trop abuser et de m’y mettre moi aussi, je lui ferai un bon petit wok pour la remercier. Il arrive que les enfants dorment dans le bus, et inverse que Luno et Milo viennent passer la nuit dans le camping car. Ce dernier aime beaucoup dormir avec Robin, sur la banquette transformée en lit....Certains soirs, nous nous plaisons à partager un moment de complicité en fumant une bonne chicha (narghilé).

Onze ans après l’ouragan Katrina, qui a fait plus de 1500 morts et qui aurait déplacé près d’un million de Louisianais, nous pénétrons dans le district de Lower Ninth Ward. Cette banlieue de la Nouvelle Orléans fut la première et la plus touchée par la catastrophe à un tel point que certaines agences touristiques proposent une visite de la zone, il y en a qui n’ont pas de scrupules….. Le quartier se trouve en contrebas des digues de protection de la ville et est composée de terrains marécageux asséchés stupidement par l’homme pour gagner des terres construisibles.

Beaucoup de rues semblent avoir été refaites à neuf ou sont en plein travaux, réseau d’eau, électricité, chaussée, et villas. Toutes les bâtisses sont construites sur des piliers 1m voir 2m au dessus du sol,  ce sont en fait des constructions sur pilotis. L’espace libre sert de rangement bien souvent, on peut y garer des vélos, mobylettes, skates ou toutes sortes de trucs que l’on ne sait pas ou mettre. Cet espace a un rôle de vide sanitaire et de garage en même temps, un escalier mène à la porte d’entrée.

Mais les traces de Katrina sont encore visibles bien que pas mal d’efforts aient été déployés, de nombreuses bâtisses sont abandonnées, abimées par l’ouragan. Certains espaces sont devenus de vraies poubelles avec des bateaux abandonnés, des voitures brulées, et des dépôts d’ordures en tout genre. En ce qui concerne les habitations, les toits, les fenêtres, les façades sont partiellement détruits. Bien souvent des bâches ont été installées pour protéger des intempéries, mais pas de l’humidité….. Certaines personnes habitent dans des mobil homes défraichis, on en verra même sortir d’un camping car à moitié pourri.

Certains ont été oublié, apparemment ! Le spectacle est désolant, onze ans n’ont pas suffit pour refaire à neuf le quartier…… Les autorités publiques étaient-elles vraiment motivées ? N’aurait il pas mieux fallu reloger toutes les habitants et  redonner ses droits à la nature car après tout ses terres étaient marécageuses dans le passé……. ?

Le temps passe et nous avons beaucoup de mal à décoller de la Nouvelle Orléans. Avec une petite pointe d’amertume nous quittons notre camp de base. Une petite photo souvenir devant notre Wal-Mart ou nous serons restés deux semaines s’impose : après tout ce sera l’endroit que nous aurons le plus fréquenté……

 

 

 

 

                                      

 

 

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